Les 5 clefs de longévité des centenaires

par | 1 Mar 2024 | Aliments et santé

femme âgée

Il existe 5 endroits sur Terre où le nombre de centenaires est bien plus élevé que la normale : les « zones bleues »

Michel Poulain, démographe et professeur émérite de l’UCLouvain, a introduit le concept de zone bleue en 2000. Il a été popularisé par le journaliste américain Dan Buettner.

Ces cinq zones bleues sont :

  • Okinawa au Japon
  • Ogliastra, une région de Sardaigne en Italie
  • Nicoya au Costa Rica
  • Ikaria en Grèce
  • Et plus récemment, la Martinique en France.

Là où cela devient intéressant et concret pour nous, c’est que des points communs ont été identifié dans les habitudes de vie et d’alimentation des habitants de ces 5 zones. Il est donc possible de s’en inspirer pour espérer prolonger sa vie en bonne santé.

Voilà 5 clefs de la longévité que les centenaires des zones bleues nous enseignent.

1- Activité physique : bouger un peu tout le temps

Premier constat choc, tant il va à contre-courant des préconisations et injonctions modernes : les habitants des zones bleues ne font pas de sport ! Pas de footing, de HIIT, de musculation, de cardio-training ou encore de crossfit…

Par contre, ces centenaires mènent une vie globalement plus active. Ils marchent régulièrement. Ils jardinent. Ils font leur ménage, ils font leur pain à la main.

Les chercheurs ont découvert qu’ils bougent en moyenne toutes les 20 minutes environ.

2- Alimentation : des végétaux complets et peu de viande

Les centenaires de ces 5 zones s’alimentent à 90% avec des végétaux et donc très peu de viande.

Ils consomment surtout :

  • des céréales complètes
  • des légumes du jardin
  • des tubercules : ignames en Martinique…
  • des légumineuses (fèves, haricots…)

La viande est consommée environ une fois par semaine.

Contrairement à une idée reçue, l’île d’Okinawa consomme même relativement peu de poisson par rapport au reste du Japon mais plutôt de l’Imo (un tubercule local) et du tofu en guise de source de protéines végétales et locales.

En Sardaigne, très peu de viande au menu également, jamais de boeuf, un peu de porc (une fois par semaine) et de poulet de temps en temps, des gnocchis, des haricots blancs, et plus surprenant, relativement peu d’huile d’olive par rapport au reste de l’Italie car c’est un un produit peu cultivé dans les régions montagneuses.

Globalement, ces régions sont surtout peu exposées aux aliments ultra transformés et industriels qui envahissent les étals de nos super-marché occidentaux.

3- Des relations sociales épanouies pour lutter contre le stress

Autre point commun, les habitants de ces régions mènent des vies bien remplies de relations sociales fortes et des pratiques religieuses bien ancrées dans les moeurs.

Dès qu’is sortent de chez eux, ils rencontrent des amis et connaissances, discutent. Ils se retrouvent autour de verre de l’amitié (l’équivalent de l’apéro en France).

Globalement, ces centenaires vivent aussi une vie avec un but et du sens, ce qui permet de gagner 8 ans de vie en moyenne selon les recherches des démographes. Cette quête de sens s’appelle « Ikigai » à Okinawa, « Plan de vida » au Costa Rica, en France on parlerait d’Art de vivre, en Martinique « Pa ni pwoblem » peut-être ?

Tout cela joue sur le niveau de stress ce qui au final, à un effet sur la durée de vie.

4- Pas de supers aliments mais des aliments bénéfiques pour le microbiote

Ces zones bleues ne partagent pas de « supers aliments » si tendance. Certes, à Okinawa, on boit du thé vert, mais pas ailleurs… En fait, le point commun se trouve dans la consommation d’aliments fermentés comme des fromages, des sauces…

Globalement, l’alimentation est très riche d’un cocktail de fibres et de polyphénols différents apportés par environ 20 ou 30 aliments de base. Ceci semble agir sur la bonne santé du microbiote intestinal et sur le système immunitaire.

5- Prendre le temps

Les centenaires des zones bleues savent prendre leur temps.

Ils mangent plus lentement, 3 fois plus lentement qu’un américain moyen.

Les routines et rituels quotidiens aident à se détendre et à ménager des moment de calme et de concentration. Dans ces zones, on accorde en moyenne 15 minutes par jour de prière ou de méditation pour se souvenir de ses parents et grands parents. Ceci a probablement un effet bénéfique sur le cortisol, l’hormone du stress.

Les habitants sont aussi très proches de la nature (mer, forêt)…

Quels enseignements en tirer pour vivre plus vieux ?

Pour atteindre un âge vénérable, il ne s’agit pas d’un seul changement à mettre en oeuvre mais de plusieurs petits changements et d’habitudes auxquels vous pouvez vous tenir pour la vie. Ils doivent donc être faciles et agréables.

Il est important de manger local, ce qui pourrait pousser dans son jardin (ou encore mieux, de faire pousser soi-même sa pitance) : des tubercules, des légumineuses, des fruits…

Pas besoin de sport intense comme du HiiT ou du running mais plutôt adopter un mode de vie actif : éviter la voiture, marcher, faire du vélo, jardiner, faire le ménage…

Si on a un travail sédentaire, trouver un moyen de bouger plus toutes les 20 minutes : bureau assis-debout, pédalier, petites séances d’étirements…

Peut-être plus délicat : il faut aussi probablement « sélectionner » son cercle intime d’amis, en essayant de rester au plus près de ceux qui vivent le plus sainement. Si vos meilleurs amis sont en mauvaise santé, et ont une hygièene de vie médiocre, vous risquez de l’être aussi.

Il faut créer des routines de détente : promenade digestive, méditation, prière, respiration, chant…

A noter : les zones bleues sont en train de disparaitre sous l’effet de la mondialisation. Mais dans ces sanctuaires, il y a de plus en plus de consommation de viande et de fast food. Les traditions culinaires des anciens qui savaient associer les aliments se perdent. C’est dramatique pour l’humanité.

A propos de la seule zone bleue française : la Martinique

Depuis 2023, la Martinique fait partie des zones bleues. Ce département français d’outre-mer abrite 400 centenaires. Un nouveau-né sur quarante va devenir centenaire. C’est deux fois plus qu’en Belgique.

Mais cette longévité des Martiniquais ne fonctionne que s’ils restent sur leur île. Ceux qui émigrent en métropole ne vivent pas aussi vieux.

Pour expliquer cette longévité, Michel Poulain propose trois hypothèses.

  1. La génétique : une forte sélection liée au contexte éprouvant de l’esclavage dont la plupart des antillais sont issus.
    La longévité constitue une composante héréditaire qui compterait pour 25 % sur le potentiel global de longévité.
  2. Le climat et le style de vie : « on y prend le temps de vivre » explique le démographe.
  3. Une sécurité sociale et des soins de santé performants.

Ayant vécu en Martinique jusqu’à mes 20 ans, je peux ajouter une éventuelle explication complémentaire : les antillais sont très soucieux du bien-être de leurs parents et grands-parents. Ils n’hésitent pas à les garder et à s’en occuper à la maison avec un grand respect de leur condition de vie et de leur sagesse. On est donc probablement dans un cas de figure très différent du type d’attention que l’on peut prodiguer dans un EHPAD standard.

Menu type OKinawa

Le style de vie à Okinawa se caractérise par un mode de vie sain avec un régime pauvre en calories mais riche en phytonutriments sous forme d’antioxydants et de flavonoïdes (1).

De nombreuses caractéristiques du régime alimentaire d’Okinawa sont partagées avec d’autres modèles alimentaires sains, tels que le régime méditerranéen traditionnel ou le régime moderne DASH : faibles taux de graisses saturées, apport élevé en antioxydants, faible charge glycémique qui réduisent le risque de maladies cardiovasculaires, de certains cancers et d’autres maladies chroniques en réduisant notamment le stress oxydatif.

Petit-déjeuner :
– Un bol de riz complet ou d’orge
– Soupe miso avec tofu et algues
– Légumes sautés (par exemple, des épinards ou du bok choy)
– Thé vert

Déjeuner :
– Sashimi de saumon ou de tofu pour une option végétarienne
– Salade d’algues avec vinaigrette au sésame
– Riz complet ou quinoa
– Légumes à la vapeur (carottes, brocoli)
– Une portion de patate douce d’Okinawa

Collation :
– Edamame (fèves de soja vertes)
– Fruit frais, comme une orange ou une pomme

Dîner :
– Poisson grillé (comme le maquereau) ou tempeh pour une option végétarienne
– Riz complet ou nouilles soba
– Légumes sautés avec gingembre et ail
– Soupe aux champignons Shiitake
– Une petite portion de kimchi ou autres légumes fermentés

Dessert (optionnel) :
– Fruit frais ou une petite portion de mochi (gâteau de riz japonais)

Menu type de la région de Nicoya au Costa Rica

Petit-déjeuner :

  • Gallo pinto (riz et haricots noirs mélangés, assaisonnés de coriandre, d’oignons et de poivrons, servis avec des œufs brouillés, des tortillas de maïs et des bananes plantains frites)
  •  Jus de fruits frais

Déjeuner :

  • Salade verte avec avocat et tomates
  • Ceviche de poisson frais (poisson mariné dans du jus de citron vert, avec des oignons rouges, des poivrons, de la coriandre et des épices, servi avec des tortillas de maïs)
  • Riz aux légumes et haricots noirs

Dîner :

  • Casado (assiette de riz, de haricots noirs, de salade et de bananes plantains frites)
  • Soupe aux légumes
  • Fruits frais de saison.

Menu type de la région de Nuoro en Sardaigne

Petit-déjeuner :

  • Café au lait et biscuits sardes traditionnels, tels que les « pardulas » (gâteaux au fromage frais et au safran) ou les « amaretti » (macarons aux amandes)
  • Pain sarde (« pane carasau ») avec de l’huile d’olive et du fromage de brebis

Déjeuner :

  • Antipasti de fromages sardes, tels que le jambon cru (« prosciutto crudo ») et le fromage de brebis (« pecorino sardo »)
  • Pâtes à la sauce tomate et à la viande (« ragù ») ou aux légumes (« verdure »)
  • Salade verte avec de l’huile d’olive et du vinaigre balsamique

Dîner :

  • Soupe de poisson (« zuppa di pesce ») ou de légumes (« minestrone »)
  • Fromage de brebis (« pecorino sardo ») et fruits frais

Quelques chiffres sur les centenaires des zones bleues

Pour un homme Nicoyan de 60 ans, la probabilité de devenir centenaire est sept fois plus élevée que pour un homme japonais, et son espérance de vie est de 2,2 années supplémentaires.

En Sardaigne, dans le Nuoro, un village hors-normes compte près de 60 centenaires pour 3.000 habitants au cours des 30 dernières années.

Pour aller plus loin

  1. Une étude sur les caractéristique du mode de vie à Okinawa : Willcox DC, Willcox BJ, Todoriki H, Suzuki M. The Okinawan diet: health implications of a low-calorie, nutrient-dense, antioxidant-rich dietary pattern low in glycemic load. J Am Coll Nutr. 2009 Aug;28 Suppl:500S-516S. doi: 10.1080/07315724.2009.10718117. PMID: 20234038.  Voir en anglais
  2. L’équivalent pour la région de Nicoya : Rosero-Bixby L, Dow WH, Rehkopf DH. The Nicoya region of Costa Rica: a high longevity island for elderly males. Vienna Yearb Popul Res. 2013;11:109-136. doi: 10.1553/populationyearbook2013s109. PMID: 25426140; PMCID: PMC4241350. Voir en anglais
  3.  Une thèse en français : Alimentation méditerranéenne, insularité et développement: les pratiques alimentaires en Sardaigne et à Malte Sophie Tessier. A lire ici en pdf
  4. Un podcast en anglais sur les zones bleues avec notamment Dan Buettner en invité
Guillaume Devaux

A propos de l'auteur

Guillaume Devaux est le fondateur du Paradis du Thé et formateur au Conservatoire National des Arts et Métiers. Il est par ailleurs rédacteur spécialisé dans le domaine de la santé et du développement personnel depuis plus de 20 ans. Il collabore régulièrement avec des médecins, kinésithérapeutes et hypnothérapeutes pour développer une vision globale du bien-être.

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